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Résiliation d'un contrat de concession pour motif d'intérêt général et indemnité due au concessionnaire.

  • Photo du rédacteur: Chloé Daguerre-Guillen
    Chloé Daguerre-Guillen
  • 10 févr.
  • 4 min de lecture

La résiliation d'un contrat public pour motif d'intérêt général est admise de longue date. La Cour administrative de MARSEILLE a rendu, le 20 Janvier 2025 (° 23MA01617), un arrêt qui en précise le régime juridique. La Cour avait également à se prononcer sur l'indemnité due au cocontractant de l'administration en pareille hypothèse.


Les faits


Le 4 octobre 2012, la région Provence-Alpes-Côte d'azur, le département des Alpes-de-Haute-Provence et le département des Hautes-Alpes ont, dans le cadre du programme national de déploiement du très haut débit en France, décidé, sur le fondement de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, de créer un syndicat mixte ouvert dénommé Provence-Alpes-Côte d'Azur Très Haut Débit (" PACA THD ") en vue du développement des réseaux de très haut débit dans leurs territoires.


Par un contrat d'affermage conclu le 5 décembre 2015, ce syndicat mixte a délégué à la société Provence Alpes Connect (" PACT ") l'exploitation du service public de l'exploitation d'un réseau de haut et très haut débit sur le territoire des départements des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes, ce périmètre étant élargi, par l'effet d'un avenant n° 4 conclu le 19 juillet 2017, au département des Bouches-du-Rhône.


Ce contrat prévoyait, au cours de la phase 1, la remise à la société fermière de 62 000 prises " fiber to the home " (FttH) sur les territoires des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence, et 54 000 prises sur celui des Bouches-du-Rhône et, au cours de la phase 2, la remise de 153 000 prises FttH supplémentaires.


Faisant face à des difficultés budgétaires pour financer la phase 2, le syndicat mixte a, par une délibération du 11 avril 2018, décidé de lancer un " appel à manifestation d'engagement locaux " pour la phase 2 du déploiement du réseau dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes.


En raison des retards dans l'exécution des travaux de la phase 1, le syndicat mixte a ensuite invité les candidats à proposer une extension de couverture sur le périmètre de la phase 1 et à formuler une offre de rachat des infrastructures existantes.


Par trois délibérations du 20 décembre 2018, le syndicat mixte a, en premier lieu, retenu l'offre de la société SFR, en deuxième lieu, décidé de supprimer le service public de communications électroniques et de résilier la délégation de service public conclue avec la société PACT et, en troisième lieu, décidé du principe de la cession du réseau à la société SFR.


Par courrier en date du 24 mai 2019, le syndicat a notifié à la société sa décision de résilier pour motif d'intérêt général la convention.


La société PACT a alors saisi le tribunal administratif de Marseille de demandes tendant à l'annulation de la délibération n° 2018-064 du 20 décembre 2018 portant résiliation de la convention de délégation de service public, à l'annulation du courrier du 24 mai 2019 et à la condamnation du syndicat mixte à lui payer la somme de 45 871 494,70 euros, assortie des intérêts moratoires, en réparation du préjudice résultant de la résiliation.


Par le jugement attaqué, dont la société PACT relève appel en tant qu'il lui fait grief, le tribunal administratif a condamné le syndicat mixte à payer à la société la somme de 87 779 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2019 et capitalisation des intérêts à compter du 17 juillet 2020, et rejeté le surplus des demandes de la société.


Le bien-fondé du motif d'intérêt général


La décision de résiliation était fondée sur l'inutilité de l'intervention publique dans le déploiement des réseaux très haut débit, compte tenu du développement d'une initiative privée rendant envisageable un déploiement sans financement public intégral des infrastructures.


La Cour considère que ces considérations constituent un motif d'intérêt général qui justifiait la résiliation de la convention et ajoute que ces considérations expliquent d'ailleurs la décision du Gouvernement, intervenue au cours de l'année 2017, de suspendre le financement des réseaux d'initiative publique par le Fonds national pour la Société numérique (FSN) géré par la Caisse des dépôts et consignations, en privilégiant le recours à des opérateurs privés dans le cadre d'appels à manifestation d'intérêts.


La Cour en conclut que dès lors que la volonté du syndicat mixte d'économiser des fonds publics en cédant le réseau existant à un opérateur privé est établie, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la pertinence de ce choix au regard de ses inconvénients, en termes patrimonial et stratégique.


Elle précise enfin la circonstance que la résiliation du contrat est justifiée par la volonté de supprimer un service public rendu inutile par le développement d'une initiative privée n'est pas de nature à lui ôter son caractère de résiliation pour motif d'intérêt général, ce motif résultant de l'économie réalisée par les financeurs publics.


L'indemnité de résiliation due au concessionnaire


La Cour rappelle, en premier lieu, que l'étendue et les modalités d'une indemnisation due en raison d'une résiliation pour motif d'intérêt général peuvent être déterminées par les stipulations contractuelles, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment d'une personne publique, une disproportion manifeste entre l'indemnité ainsi fiée et le montant du préjudice résultant, pour le concessionnaire, des dépenses qu'il a exposées et du gain dont il a été privé.


Elle ajoute que rien ne s'oppose à ce que des stipulations prévoient une indemnisation inférieure au montant du préjudice subi par le cocontractant privé de l'administration.


En l'espèce, les parties avaient effectivement fixé une indemnité de résiliation contractuellement. La Cour observe que les parties ont entendu, comme elles le peuvent sans qu'y fasse obstacle le principe de l'indemnisation intégrale du préjudice, fixer contractuellement le montant de l'indemnité due au délégataire en cas de résiliation pour motif général.


Et d'en conclure que "dès lors qu'ainsi qu'il a été dit, la résiliation doit être regardée comme une résiliation prononcée pour motif d'intérêt général, la société requérante n'est pas fondée à solliciter une indemnité supérieure au montant de l'indemnité contractuellement prévue pour ce type de résiliation."





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