Publication d'une instruction interministérielle relative aux installations photovoltaïques sur espaces naturels, agricoles et forestiers.
- Chloé Daguerre-Guillen
- 21 févr.
- 4 min de lecture
Contexte et fondements juridiques
L'instruction technique DGPE/SDPE/2025-93, parue le 18 février 2025, s'inscrit dans le cadre de l'article 54 de la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (APER), qui fixe un cadre réglementaire visant à encadrer l’implantation de structures photovoltaïques et agrivoltaïques.
Elle est complétée par :
Le décret n° 2024-318 du 8 avril 2024, qui définit les conditions d’installation et les exigences de compatibilité avec l’activité agricole.
L’arrêté du 5 juillet 2024, qui précise les aspects financiers (garanties) ainsi que les mesures de contrôle et les spécificités applicables aux zones forestières.
L'objectif est d’assurer un développement harmonieux de l’énergie solaire tout en garantissant la préservation des terres agricoles, forestières et naturelles, ainsi que la souveraineté alimentaire.
Les différentes catégories d’installations
L’instruction distingue trois types d’installations selon leur vocation et leur impact sur les terres concernées :
1. Les installations agrivoltaïques
Ces installations ont une double vocation : produire de l’énergie tout en contribuant activement au maintien et à l’amélioration de l’activité agricole.Pour être qualifiées d’agrivoltaïques, elles doivent impérativement remplir au moins un des quatre critères suivants :
Amélioration du potentiel et de l’impact agronomique (ex. : optimisation de la fertilité des sols).
Adaptation au changement climatique (ex. : protection contre la sécheresse).
Protection contre les aléas météorologiques (ex. : grêle, gel).
Amélioration du bien-être animal (ex. : fourniture d’ombre et d’abris pour le bétail).
Conditions supplémentaires :
L’installation doit garantir le maintien d’une activité agricole principale et significative, la production agricole restant prépondérante.
Un revenu durable issu de cette activité doit être démontré.
L’installation doit être réversible, c’est-à-dire démontable sans altérer durablement le terrain.
2. Les installations photovoltaïques compatibles avec une activité agricole, pastorale ou forestière
Ces installations sont autorisées sur des terrains identifiés dans un document-cadre départemental, élaboré par la chambre d’agriculture et validé par le préfet.Elles doivent répondre aux conditions suivantes :
Être implantées sur des terrains incultes ou non exploités depuis au moins dix ans.
Permettre le maintien d’une activité agricole ou pastorale.
Être réversibles.
3. Les serres, hangars et ombrières agricoles avec panneaux photovoltaïques
L’installation de panneaux sur ces structures est autorisée si et seulement si elle répond à une nécessité agricole démontrée.
Les serres photovoltaïques doivent laisser passer suffisamment de lumière pour permettre la culture sous-jacente.
Les hangars agricoles ne peuvent être considérés comme des installations agrivoltaïques puisqu’ils ne participent pas directement à la production agricole.
Les ombrières photovoltaïques sont autorisées uniquement si elles servent à protéger des cultures ou à abriter des animaux.
Critères et conditions d’implantation
L’instruction détaille les critères techniques et réglementaires qui permettent d’évaluer la conformité d’un projet.
1. Appréciation du caractère agrivoltaïque d’une installation
Un projet est considéré comme agrivoltaïque s’il respecte cinq critères cumulatifs :
Service rendu à l’agriculture : l’installation doit démontrer un apport direct à l’exploitation.
Maintien d’une activité agricole significative : la production agricole ne doit pas être marginalisée.
Revenu agricole durable : le revenu issu de l’activité agricole doit être stable et suffisant.
Activité agricole principale : la superficie agricole exploitable doit être préservée à 90 %.
Taux de couverture maximal des panneaux photovoltaïques :
Si la puissance installée est supérieure à 10 MWc, le taux de couverture ne doit pas dépasser 40 % de la parcelle.
Si la puissance est inférieure à 10 MWc, le taux de couverture peut être supérieur à 40 %, mais un suivi plus rigoureux est imposé.
2. Zones témoins et contrôles de performance
Les installations agrivoltaïques doivent comporter une zone témoin (au moins 5 % de la parcelle), permettant de comparer l’évolution des rendements agricoles avec et sans panneaux.
Des contrôles réguliers sont prévus :
Annuel pour les installations couvrant plus de 40 % de la parcelle.
Tous les 3 ans pour les autres.
Tous les 5 ans pour les technologies reconnues comme éprouvées.
3. Modalités d’implantation des installations photovoltaïques au sol
Pour éviter les conflits d’usage, seules certaines zones sont éligibles pour accueillir des installations photovoltaïques non agrivoltaïques.
Ces zones doivent être répertoriées dans le document-cadre départemental, qui inclut :
Les terres incultes (ex. : friches, anciennes carrières).
Les terres non exploitées depuis 10 ans.
Les sites à usage dégradé (ex. : anciennes installations industrielles, aérodromes désaffectés).
Procédure d’élaboration du document-cadre :
La chambre d’agriculture départementale a neuf mois pour proposer un projet de document-cadre au préfet.
Le préfet peut le modifier et l’adopter après concertation.
Avant l’entrée en vigueur de ce document, les installations photovoltaïques sont soumises aux règles antérieures à la loi APER.
Régime des autorisations et des contrôles
1. Autorisations d’urbanisme
Toute installation photovoltaïque ou agrivoltaïque nécessite une autorisation d’urbanisme délivrée par la préfecture ou la mairie.
La Commission départementale de la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) est saisie pour avis.
La demande d’autorisation doit inclure une justification du maintien de l’activité agricole.
2. Contrôles et sanctions
Des contrôles réguliers sont imposés, notamment pour vérifier que :
L’installation respecte les critères d’agrivoltaïsme.
L’activité agricole demeure significative.
Le projet génère un revenu durable pour l’exploitant.
En cas de non-respect des engagements, des sanctions financières et administratives peuvent être appliquées, allant jusqu’à la révocation de l’autorisation et l’obligation de démontage.