L’instruction des demandes d’autorisations d’urbanisme (permis d’aménager, permis de construire ou déclaration préalable) est encadrée par différents délais, lesquels peuvent être majorés en fonction du lieu de situation du bien.
Ces délais influent sur le mode d’obtention d’une autorisation et doivent être maîtrisés par les porteurs de projet afin que l’obtention de l’autorisation soit optimisée.
Quel est le point de départ du délai d’instruction ?
Le délai d’instruction d’une demande d’autorisation d’urbanisme commence à courir à compter de la réception d’un dossier complet [1].
Les projets soumis à enquête publique bénéficient de délais d’instruction différés et dont le point de départ n’est pas la réception, par le service instructeur, d’un dossier complet. Lorsque le permis ne peut être délivré qu’après enquête publique, le délai d’instruction court à compter de la réception, par l’autorité compétente, du rapport du commissaire-enquêteur ou de la commission d’enquête [2].
Le délai d’instruction est un délai dit « non franc ».
Par exemple, si le dossier de demande de permis de construire a été enregistré le 23 janvier et que le délai d’instruction est de deux mois, celui-ci commence à courir le 24 janvier et expire le 23 mars à minuit [3].
L’Administration ne dispose d’aucun délai pour adresser au pétitionnaire un récépissé de dépôt du dossier. En pratique, le pétitionnaire devra privilégier l’envoi du dossier en lettre recommandée avec accusé de réception ou la remise en main propre contre récépissé afin de prévenir toute difficulté.
Lorsqu’une demande de pièces complémentaires est émise, le point de départ du délai d’instruction est différé.
Que faire si le service instructeur notifie un délai d’instruction erroné ?
Dans le cas où l’autorité d’urbanisme notifie à tort, à la réception du dossier complet d’une demande d’autorisation d’urbanisme, un délai erroné, celle-ci dispose d’un délai d’un mois pour notifier au pétitionnaire le délai d’instruction modifié. A défaut, l’autorité n’est pas fondée à soutenir devant le juge que le délai erroné devait être retenu pour admettre la formation d’une décision tacite [4].
Quels sont les délais d’instruction de droit commun ?
Le délai d’instruction de droit commun s’élève à :
Un mois pour les déclarations préalables,
Deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle,
Trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d’aménager.
Quelles sont les hypothèses de majoration du délai d’instruction ?
Dans un délai d’un mois suivant la réception ou le dépôt du dossier en mairie, l’autorité compétente est tenue d’indiquer au demandeur :
le nouveau délai et, le cas échéant, son nouveau point de départ,
les motifs de la modification du délai,
lorsque le projet entre dans les cas prévus à l’article R424-2, qu’à l’issue du délai, le silence éventuel de l’autorité compétente vaudra refus tacite du permis.
En l’absence de notification dans ce délai, ce sont les délais de droit commun qui s’applique.
Le délai d’instruction est majoré d’un mois, notamment :
lorsque le projet est soumis à un régime d’autorisation ou à des prescriptions prévus par d’autres législations ou réglementations que le code de l’urbanisme (autorisation environnementale, autorisation de défrichement, par exemple),
lorsque le projet est situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques,
lorsque le projet doit être soumis à l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Lorsque le projet porte sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques, le délai d’instruction est porté à cinq mois.
Lorsque le permis doit être précédé d’une autorisation de défrichement en application des articles L341-3 et L214-13 du nouveau Code forestier, le délai d’instruction de droit commun est porté à :
cinq mois lorsque le défrichement est soumis à reconnaissance de la situation et de l’état des terrains ;
sept mois lorsque le défrichement fait l’objet d’une enquête publique ;
trois mois dans les autres cas [5].
Dans le cas où le permis ne peut être délivré qu’après enquête publique, le délai d’instruction est de deux mois à compter de la réception par l’autorité compétente du rapport du commissaire-enquêteur ou de la commission d’enquête.
Cette majoration n’est pas applicable quand l’enquête publique porte sur un défrichement [6].
Quelles sont les conséquences sur le mode d’obtention de l’autorisation ?
Par principe, et à défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction, le silence gardé par l’autorité compétence vaut permis de construire tacite ou non-opposition à déclaration préalable [7].
Par exception, le silence de l’administration vaut décision implicite de rejet de permis de construire notamment dans les hypothèses suivantes [8] :
Lorsque les travaux sont soumis à l’autorisation du ministre de la défense ou à une autorisation au titre des sites classés ou en instance de classement ou des réserves naturelles ;
Lorsque le projet fait l’objet d’une évocation par le ministre chargé des sites ou par le ministre chargé de la protection des réserves naturelles ;
Lorsque le projet porte sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques ;
Lorsque le projet est soumis à enquête publique en application des articles R123-7 à R123-23 du Code de l’environnement ou à participation du public par voie électronique en application de l’article L123-19 du même code ;
Lorsqu’il y a lieu de consulter l’Assemblée de Corse en application de l’article R*423-56 ;
Lorsque le projet est situé dans un espace ayant vocation à être classé dans le coeur d’un futur parc national dont la création a été prise en considération en application de l’article R*331-4 du Code de l’environnement ou dans le coeur d’un parc national délimité en application de l’article L331-2 du même code ;
Lorsque la délivrance du permis est subordonnée, en application de l’article L212-7 du Code du cinéma et de l’image animée, à une autorisation de création, d’extension ou de réouverture au public d’établissements de spectacles cinématographiques et que la demande a fait l’objet d’un refus de la commission départementale compétente ;
Lorsque le projet relève de l’article L425-4 ou a été soumis pour avis à la commission départementale d’aménagement commercial sur le fondement de l’article L752-4 du Code de commerce et que la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial a rendu un avis défavorable ;
Lorsque le projet porte sur une démolition soumise à permis en site inscrit ;
Lorsque la délivrance du permis est subordonnée, en application de l’article L425-13, à l’obtention d’une dérogation prévue par l’article L111-4-1 du Code de la construction et de l’habitation et que cette dérogation a été refusée ;
Lorsque la décision est soumise à l’accord de l’architecte des Bâtiments de France et que celui-ci a notifié, dans les délais mentionnés aux articles R* 423-59 et R*423-67, un avis défavorable ou un avis favorable assorti de prescriptions.
Lorsqu’à l’issue du délai d’instruction, la décision fait l’objet d’une décision tacite d’acceptation, il est possible de solliciter un certificat auprès du service instructeur qui doit le délivrer à première demande [9]. L’obtention de ce certificat est d’importance, afin de sécuriser l’autorisation et de pouvoir l’afficher sur site pendant une période continue de deux mois.
Si l’autorité d’urbanisme refuse de délivrer le certificat, la décision de refus peut être contestée devant les juridictions administratives [10], au besoin en introduisant un référé-suspension en cas d’urgence.
[1] Article R423-19 du Code de l’urbanisme.
[2] Article R423-20 du Code de l’urbanisme.
[3] CE, 7 juill. 2008, n° 310985.
[4] CAA Marseille, 9e ch., 12 déc. 2013, n° 11MA02145 ; CAA Lyon, 1re ch., 2 oct. 2012, n° 12LY00334.
[5] Article R. 423-29 du Code de l’urbanisme.
[6] Article R423-32 du Code de l’urbanisme.
[7] Article L424-2 et R424-1 du Code de l’urbanisme.
[8] Articles R424-2 et R424-2 du Code de l’urbanisme.
[9] Article R424-13 du Code de l’urbanisme.
[10] CE, 12 février 2020, n° 421949